Accueil Enseignantes celebrees Mae Chee Kaew (1901-1991), une Arahant des temps modernes

Mae Chee Kaew (1901-1991), une Arahant des temps modernes

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L’histoire inspirante des épreuves et des tribulations d’une simple villageoise issue d’une famille pieuse à Baan Huay Sai, dans le nord-est de la Thaïlande. Elle était la cadette d’une famille de 5 enfants, n’ayant tous reçu aucune éducation formelle. Sa mère mourut quand elle avait cinq ans.

À l’âge de 17 ans, elle fut contrainte de se marier. Son mariage ne fut pas heureux et son mari infidèle. Ne pouvant avoir d’enfant, le couple adopta la fille d’un parent.

Lassée des souffrances de cette vie, elle plaidait chaque année auprès de son mari pour participer à une retraite de méditation de trois mois. Ce n’est qu’après l’intervention de son oncle que son mari céda. Après avoir goûté pour la première fois à un renoncement temporaire, Maechee Kaew décida de poursuivre son chemin de toute une vie vers l’illumination.

Bonheur d’aller de l’avant

À l’âge de 37 ans, après 20 ans de mariage, son mari consentit au divorce à condition qu’elle lui cède tous ses biens. Elle prit également des dispositions pour sa fille avant de devenir maechi (mae chee, renonçante). Les défis auxquels elle se trouva confrontée en tant que femme renonçante sont évidents.

Son expérience de méditation

Mae Chee Kaew eut beaucoup de chance d’apprendre la méditation auprès de grands maîtres de la méditation tels qu’Ajahn Sao en 1914 et Ajahn Mun en 1917, lorsqu’ils vinrent séjourner auprès de son village. Les méthodes et les techniques qu’ils lui enseignèrent étaient la répétition du mot ‘buddho’ pour entrer en samadhi. Après cela, on lui conseilla de se tourner vers l’intérieur pour examiner son esprit, pour enlever les couches et les couches de souillures jusqu’à ce qu’il ne reste que l’esprit pur.

Ajahn Mun constata qu’elle possédait des capacités psychiques hors du commun et un grand potentiel spirituel. Même en tant que débutante, son esprit s’absorbait profondément pendant des heures. Ajahn Mun, lui-même un arahant et doté de pouvoirs psychiques, put se rendre compte qu’elle connaissait parfois des épisodes effrayants dans sa méditation. Il demandait à la voir le lendemain matin pour qu’elle lui en parle afin qu’il puisse la guider.

Quand elle sut qu’Ajahn Mun avait décidé de rester à proximité pendant les trois mois de la saison des pluies, Mae Chee Kaew fit don de vingt acres de terre pour la construction d’un monastère, Wat Nong Nong, pour lui et ses disciples. Après la retraite, avant qu’Ajahn Mun ne parte, il lui dit qu’il l’acceptait comme disciple, car il voyait son potentiel pour atteindre le but ultime d’arahant. Elle avait alors 16 ans et son père ne donna pas son consentement. Ajahn Mun lui conseilla alors de cesser de méditer, car sans un enseignant qualifié pour la guider, les capacités étonnantes de son esprit auraient pu lui causer plus de problèmes que de réalisation. Il lui demanda d’attendre un autre maître.

Après être devenue maechi (renonçante), Mae Chee Kaew pratiqua la méditation auprès de divers bhikkhus et reçut un terrain de 20 acres pour la construction d’un lieu de pratique.

 

Disciple d’Ajahn Maha Boowa

En 1951, Ajahn Maha Boowa arriva dans son village et devint son maître. Ajahn Maha Boowa, qui avait lui-même atteint l’état d’arahant, vit également son potentiel d’illumination, mais il vit également le danger qu’elle soit distraite par des phénomènes psychiques auxquels elle risquait de s’attacher, l’empêchant de progresser. Il lui conseilla de tourner son énergie vers l’intérieur pour étudier la nature de son esprit et de son corps.

Lorsqu’elle expérimenta des flots de lumière et une sensation de vide total, elle confondit cette expérience avec le Nirvana. Elle ne croyait pas les conseils de son maître selon lesquels il y avait toujours un élément de souillure personnelle et subtile. Lorsque toutes les explications et tous les conseils échouèrent, Ajahn Maha Boowa lui demanda de partir.

Réalisation de l’Arahantship

Réalisant sa folie et son entêtement, elle s’excusa auprès de son maître puis entra dans une longue retraite silencieuse. Elle pratiquait avec diligence, ne dormait que très peu et, certains jours, ne mangeait pas du tout. Elle identifia d’abord la fausseté des formes, puis de la pensée, et les étapes pour déconstruire le moi. Elle expérimenta finalement la conscience suprême et s’y plongea jusqu’à atteindre son objectif final.

À l’instar de l’expérience du Bouddha et de Ajahn Maha Boowa après leur accomplissement, Mae Chee Kaew se rappela ses vies passées et s’interrogea sur l’impossibilité d’enseigner aux autres comment atteindre le même objectif. Cependant, elle réalisa rapidement que si elle avait pu atteindre la libération, les autres le pourraient aussi.

Pouvoirs psychiques inhabituels

Dès l’âge de 7 ans, Mae Chee Kaew avait expérimenté des capacités inhabituelles de communication psychique avec des êtres invisibles – divinités célestes, nagas, animaux et fantômes affamés de la cosmologie bouddhiste. Elle était souvent invitée à leur rendre visite dans les différents royaumes célestes et infernaux. Elle pouvait même voir les vies passées de ces êtres. Son père la décourageait de parler de ces phénomènes.

À l’âge adulte, en méditant, elle connut des contacts avec des animaux qui se plaignaient auprès d’elle d’avoir été brutalement tués par des fermiers.

Mae Chee Kaew avait la capacité de prédire des événements, de lire les pensées ainsi que certains pouvoirs de guérison. Pendant une saison de sécheresse, elle put mener sa communauté monastique à des sources d’eau cachées dont elle avait eu la vision un jour en méditant.

Elle surprit son maître, Ajahn Maha Boowa, qui vivait à quelques kilomètres de la communauté de renonçantes avec qui elle vivait, en sachant qu’il quittait les environs avec ses disciples. Elle savait exactement quand ils reviendraient et demanda alors aux nonnes de préparer de la nourriture pour la lui offrir le lendemain matin, à plusieurs kilomètres de là.

Mort d’une Arahant

En 1977, on lui diagnostiqua une tuberculose pulmonaire, un diabète et un cancer, mais elle survécut jusqu’en 1991. À sa mort, au moment de la crémation, ses os se transformèrent en reliques de différentes couleurs, en forme de perles et de cristaux. C’était la dernière preuve de ses plus hauts accomplissements spirituels, d’arahant.

Ajahn Maha Boowa, lors de son éloge funèbre, déclara que les chants funèbres n’étaient pas nécessaires, car en tant qu’Arahant, ils ne pouvaient rien lui apporter. Il ajouta également que, que nous soyons un homme ou une femme, nous sommes également capables d’atteindre l’illumination, peu importe la lignée ou la tradition que nous pratiquons. Il fit ériger un stupa à sa mémoire.

Conclusion

Mae Chee Kaew a laissé en héritage une inspiration pour les générations futures. Elle a prouvé que l’obtention de l’état d’Arahant n’est pas impossible, tant pour les femmes que pour les hommes, et même à l’époque moderne. Nous ne devrions donc pas sous-estimer notre potentiel spirituel et notre aspiration à nous consacrer avec ardeur à la pratique.

Cet article a été rédigé par Barbara Yen à l’occasion de la célébration de la Journée internationale des Bhikkhuni 2014 à la Gotami Vihara Society Malaysia, qui rend hommage aux éminentes femmes bouddhistes asiatiques à l’ère moderne. Traduction Bouddhisme au féminin

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