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Jeanne Schut

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Rencontre avec le bouddhisme par Jeanne Schut

À l’âge de 23 ans, alors que, depuis plusieurs années déjà, je cherchais désespérément une réponse à la souffrance du monde, un ami m’a parlé du bouddhisme. Étudiante aux États-Unis, j’ai suivi un cours sur les religions orientales et là, mon enseignant a suggéré que j’aille en Thaïlande, « aux sources du bouddhisme ancien ». À cette époque, j’étais plutôt attirée par l’Inde, mais c’est cette suggestion qui m’a mise sur la route. Un peu plus tard, une jeune femme rencontrée par hasard m’a suggéré de commencer mon périple en Inde en allant dans un petit village au pied de l’Himalaya où un moine anglophone enseignait la méditation à des Occidentaux. J’ai suivi son conseil et j’ai découvert la méditation.

Le monde aurait pu s’arrêter là pour moi.
Mais la vie continue et, s’il fallait continuer, cela ne pouvait être que dans cette voie. J’ai demandé au moine comment poursuivre et approfondir la pratique et il m’a parlé de son monastère de forêt en Thaïlande. Armée de sa bénédiction sous la forme d’une lettre de recommandation, je suis arrivée en Thaïlande – comme l’avait suggéré mon professeur américain…

Le séjour d’un mois que j’ai fait dans ce monastère de forêt a changé ma vie à tout jamais.

De retour en France, la vie « dans le monde » s’est emparée de moi – question de karma probablement. J’ai enseigné les langues, je me suis mariée, j’ai eu deux enfants… et j’ai eu la chance de retrouver le bouddhisme de la tradition de la forêt quasiment à ma porte !

Ma formation à la méditation a repris puis elle s’est enrichie d’une étude du Dhamma à travers la traduction de livres et grâce à des rencontres avec des moines dont j’étais l’interprète. J’ai fini par retourner en Thaïlande où j’ai fait plusieurs longs séjours dans des monastères de forêt.

Un jour, un message m’est arrivé de Thaïlande : deux jeunes Hollandais s’étaient adressé au monastère d’Ajahn Buddhadasa, où ils avaient fait une retraite de dix jours, pour demander qu’on leur recommande une personne qui pourrait transmettre le Dhamma de la tradition de la forêt thaïlandaise en français et en anglais. Ils avaient une grande maison en Auvergne qu’ils voulaient transformer en Centre de méditation. Leur demande a été transférée plusieurs fois et a fini par arriver jusqu’à moi. Étais-je disponible ?

Suite à la suggestion d’un moine, je venais de me former à la MBSR pour transmettre la méditation à des personnes souffrantes ou à des enfants mais je n’avais jusque-là rencontré aucun intérêt parmi la population locale (hôpitaux et écoles). Cette demande ressemblait à un tour du destin : on me proposait de transmettre le Dhamma du Bouddha tout entier plutôt que seulement la méditation.

Premiers pas dans la transmission du Dhamma

Finalement il n’y a eu qu’une seule retraite en Auvergne mais cette expérience m’a lancée sur la trajectoire de la transmission du Dhamma. Le hasard – toujours lui – m’a fait connaître un lieu tout proche de chez moi qui accueille des stages dans le domaine du bien-être.

Transmettre le Dhamma a été une révélation en plusieurs étapes. La première fois, en Auvergne, j’ai été presque effrayée de voir que j’étais, en quelque sorte, guidée de l’intérieur. Complètement présente et « inspirée » au-delà de ce que ma petite personne aurait été capable de dire ou faire…

Ensuite, il y a eu la période « enthousiaste ». Je m’émerveillais du Dhamma en en parlant et je me réjouissais infiniment d’avoir l’opportunité de le transmettre. Mais j’ai dû en inquiéter plus d’un !…

Enfin, tout s’est calmé. Le contact avec d’autres enseignants m’a fait comprendre que nous étions tous « guidés » quand nous abordions le Dhamma, et des passages de livres que j’ai traduits parlent de « l’enivrement » que l’on peut parfois ressentir dans la pratique, notamment l’envie de parler, parler, parler du Dhamma et de rien d’autre !

Gratitude à « mes élèves »

Aujourd’hui j’aborde les retraites de méditation avec joie et sérénité. Les entretiens individuels me permettent de mieux connaître chaque participant et de personnaliser les conseils de pratique.

Et j’apprends, j’apprends beaucoup. La moindre des choses, quand on transmet un savoir et des techniques, c’est d’en avoir soi-même une bonne expérience. Alors je me vois encouragée à poursuivre la pratique toujours plus loin, à partir d’angles différents, pour trouver les mots justes pour chacun(e) – et, même si ce n’est pas le but recherché, je suis la première à en bénéficier !

Ainsi, la première Noble Vérité du Bouddha, « Il y a la souffrance », peut être interprétée comme : « Il y a la souffrance dans le monde » – et je ne sais pas trop ce que je peux y faire – ou « Mon regard, obscurci par l’avidité, l’aversion et l’ignorance, voit le monde comme souffrant. Si je commençais par nettoyer mes lunettes ? »

Il est aussi très troublant de constater à quel point nous nous ressemblons tous. Presque chaque fois qu’un méditant partage une difficulté personnelle avec moi, je pourrais lui dire (et je le dis parfois) : « Je vois tout à fait. J’ai vécu cette situation. » Voir l’universalité de la souffrance humaine nous rapproche toujours plus de cette notion, si étrange au premier abord, d’impersonnalité des phénomènes ou non-soi comme dirait le Bouddha. « Ce n’est pas personnel. Voyez et laissez passer. Ça passera parce qu’il est dans la nature de toute chose de passer. » Simple mais pas facile à appliquer. Pas facile mais simple, alors il est bon, tout de même, de s’en souvenir régulièrement. Voilà pourquoi nous méditons !

Quand, à la fin d’une retraite, on me remercie, je sais bien que c’est moi qui dois remercier les participants de m’avoir donné l’occasion de continuer à avancer sur la voie et de partager ce qui me tient tellement à cœur : la méditation et le Dhamma.

MERCI !

Publications

À la demande d’un moine, j’ai commencé par traduire les enseignements de grands maîtres de méditation comme Ajahn Chah et, plus tard, de femmes éveillées comme Upasika Kee et Dipa Ma. L’émission Sagesses Bouddhistes de France2 m’a donné l’occasion de les présenter à la télévision.

Par ailleurs, certains écrits de grands maîtres thaïlandais que j’ai traduits sont réservés à une publication gratuite, alors je les ai « postés » sur le site www.dhammadelaforet.org qui a été créé spécialement pour cela par un ami, ancien moine de forêt.

Pour finir, je voudrais partager avec les lectrices et les lecteurs de Bouddhisme au féminin, un texte qui me tient très à cœur : le Karaniya Metta Sutta, les paroles du Bouddha sur l’Amour Universel.

Avec toutes mes amitiés dans le Dhamma,

Jeanne Schut

Karaniya Mettā Sutta

Voici comment devrait se comporter
Celui/celle qui a développé des qualités de bonté
Et qui connaît la voie de la paix :
Qu’il/elle soit appliqué, honnête et droit,
Direct et doux dans ses paroles.
Humble et sans prétention,
Satisfait, aisément contenté.
Qu’il/elle ne se laisse pas submerger par les obligations et demeure frugal.
Qu’il/elle soit paisible, maître de ses sens,
Naturellement discret, sans exigences.
Et qu’il/elle ne fasse rien
Que les sages, plus tard, pourraient condamner.
Qu’il/elle médite ainsi :
« Prenant moi-même refuge dans le bonheur et la paix,
Je souhaite que tous les êtres soient heureux et en paix.
Que tous les êtres vivants, quels qu’ils soient
— Les faibles comme les forts, tous sans exception,
Les grands et les puissants, les moyens et les petits,
Visibles et invisibles, proches et lointains, nés et à naître —
Que tous les êtres soient heureux et en paix !
Que nul ne trompe autrui, ni ne méprise aucun être, quel qu’il soit.
Que nul, par colère ou aversion, ne souhaite de mal à autrui.

Comme une mère, au péril de sa vie,
Protège son enfant, son unique enfant,
Ainsi doit-on ouvrir son cœur à l’infini à tous les êtres vivants,
Rayonner la bienveillance envers le monde entier :
Ouvrir son cœur dans toutes les directions
– En haut, en bas et tout autour, sans limites –
Libre de toute haine et de toute aversion.
Que l’on soit assis, debout, en marche ou couché,
Tant que l’on est éveillé, on doit toujours être fidèle à ce souhait.
C’est ce que l’on appelle
« Demeurer dans un état divin ici et maintenant ».
Sans se laisser piéger par des croyances erronées (*)
Celui/celle qui a le cœur pur, qui voit la vérité ultime des choses
Et s’est libéré de tous les désirs sensoriels,
Ne reprendra plus jamais naissance dans ce monde

(*) Croyance en un « moi » permanent, personnel, capable de trouver un bonheur durable dans ce monde.

Jeanne Schut a traduit l’ouvrage de Amy Schmit : Présence et rayonnement d’une femme bouddhiste ainsi que Pure et simple, les enseignements de Upasika Keee Nanayon, et d’autres ouvrages toujours dans la tradition Théravada.

Elle est l’auteure de deux ouvrages :
Et s’il suffisait d’être présent, les enseignements d’Ayya Khema, éditions Sully, 2015.
– Les Aventures de Boon et Pranee dans la Jungle. Livre illustré pour enfants et adultes publié par l’auteur, disponible via le site dhammadelaforet.org.

Voir un enseignement de Jeanne Schut sur l’impermanence

Mise à jour 2019 – Jeanne Schut n’enseigne plus, voir plus d’informations sur son site