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Clara Zetkin : une voix pour les femmes

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Clara Zetkin a été enseignante,  journaliste et femme politique allemande. Elle est une figure historique du féminisme, plus précisément du féminisme socialiste. Elle combattra avec passion pour les femmes et pour la paix. Elle mettra en question avec lucidité les prétentions autoritaires des gouvernements, des partis et des hommes politiques.

Clara Zetkin est née en Saxe, le 5 juillet 1857 de parents aux idées avancées concernant l’éducation d’une fille. Clara se destine à l’enseignement et étudie à l’école normale féminine de Leipzig. Dès le milieu des années 1870, elle fréquente les mouvements féministes et commence à adhérer à la mouvance socialiste. En 1878, August Bebel, socialiste, publie, malgré la censure, La femme et le socialisme dans lequel il inscrit la question de la place des femmes dans la société dans un processus socio-historique, avec une étude très documentée sur les différentes formes d’oppression subies par les femmes dans l’histoire. Combattant l’idée de la ‘sujétion naturelle’ de la femme à l’homme, il démontre la liaison inséparable existant entre la question féminine et la question sociale, entre la libération de la femme et celle de la société toute entière.

Son livre a un impact immense. Clara Zetkin rendra de nombreuses fois hommage à Bebel et à son travail de pionnier. En 1878, elle s’engage dans les mouvements socialistes clandestins. Elle y rencontre le révolutionnaire russe Ossip Zetkin, arrêté et expulsé d’Allemagne à l’été 1890. Elle le rejoint en 1882 à Paris, où ils vivent pauvrement et ont deux enfants. Bien qu’ils ne soient pas mariés, Clara prend le nom de son compagnon et le gardera jusqu’à sa mort. Ils font la connaissance de Louise Michel, et d’autres figures marquantes du socialisme international. Ossip Zetkin décède de tuberculose en 1889.

Clara Zetkin participe à la préparation au Congrès ouvrier international qui se tiendra à Paris en juillet 1889 et qui donnera naissance à la IIe Internationale. Elle y présente un rapport sur la situation des travailleuses sous le capitalisme et y prononce le premier discours de sa vie : Pour la libération de la femme, à une époque où elles n’avaient le droit de vote dans aucun pays. Dans son discours, elle expose qu’« en combattant la main dans la main avec les ouvriers socialistes, les femmes se montrent prêtes à prendre part à tous les sacrifices et efforts de la lutte, mais elles sont aussi décidées, à juste titre, à exiger après la victoire tous les droits qui leur reviennent. » Ses interventions sont déterminantes dans la décision de la IIe Internationale à inviter les socialistes de tous les pays à impliquer les femmes dans la lutte des classes, et un an plus tard, le programme social-démocrate (dit ‘programme d’Erfurt’) intègre la revendication de l’égalité économique, politique et juridique de la femme. Clara s’est affirmée à la fois comme dirigeante politique d’envergure internationale, et comme théoricienne des problèmes féminins. Elle a 32 ans.

Les femmes des milieux ouvriers jouent alors un grand rôle dans le mouvement socialiste, notamment lors des grandes grèves des années 80. La loi interdisant le parti socialiste est abrogée et Clara Zetkin peut rentrer en Allemagne avec ses deux enfants.

En 1892 paraît le premier numéro de Die Gleichheit (L’Egalité), premier journal politique féminin, longtemps seul dans son genre en Europe. Clara Zetkin, fixée à Stuttgart, en est la rédactrice en chef et l’animera jusqu’en 1917. Le journal sera un véhicule puissant pour la diffusion de ses idées.

En août 1907, elle est élue responsable du secrétariat international des femmes du mouvement socialiste, et c’est aussi elle qui fait adopter par le congrès de l’Internationale la résolution selon laquelle « les partis socialistes de tous les pays ont le devoir de lutter énergiquement pour l’instauration du suffrage universel des femmes. »

A Paris, elle participe activement à la fondation de la Deuxième Internationale où elle réclame l’égalité complète des droits professionnels et sociaux de la femme ainsi que sa participation active à la lutte des classes.

En août 1907, les 56 déléguées de 14 pays réunies à Stuttgart dans la première Conférence Internationale des femmes socialistes élisent Clara Zetkin à la présidence du secrétariat international des femmes socialistes.

Le 8 mars 1910, lors de la 2e Conférence internationale des femmes socialistes à Copenhague, Clara Zetkin propose la création de la journée internationale des femmes, journée de manifestation annuelle afin de militer pour le droit de vote, l’égalité entre les sexes, et le socialisme. Cette initiative est à l’origine de la Journée Internationale des Femmes du 8 mars.

Dès 1911, un million de femmes manifestent en Autriche-Hongrie, au Danemark, en Suisse, en Allemagne, puis les années suivantes en France, aux Pays-Bas, en Russie et en Suède pour réclamer le droit de vote.

Clara Zetkin devient très proche de Rosa Luxemburg. Opposante à la première guerre mondiale, en septembre 1914, elle adresse à plusieurs journaux des pays neutres une lettre condamnant la politique de son parti qui vient d’approuver l’entrée en guerre de l’Allemagne.

Clara Zetkin et Rosa Luxembourg - 1910
Clara Zetkin et Rosa Luxembourg – 1910

Elle mène de nombreuses actions pacifistes. Elle quitte le parti socialiste et rejoint le parti communiste. En mars 1915, étant passée illégalement par la Hollande, elle assure à Berne la tenue d’une conférence internationale des femmes socialistes où s’affirme l’opposition à la guerre. Ce qui lui vaudra, à son retour en Allemagne, d’être inquiétée, arrêtée, emprisonnée comme l’est depuis l’année précédente Rosa Luxembourg qui sera assassinée en 1919.

La révolution allemande de novembre 1918 permet au mouvement féministe d’obtenir le droit pour les femmes de voter et d’être élues : Clara Zetkin est élue députée au Reichstag en 1920 et elle sera à chaque fois réélue pendant toute la durée de la République de Weimar.

L’autorité de Clara Zetkin dans le mouvement ouvrier international est telle qu’à l’automne 1920, Lénine lui demande d’aider à la création d’un puissant mouvement féminin international. Il a avec elle, dans son bureau du Kremlin, plusieurs conversations sur la question féminine qu’elle rapporte dans ses « Notes sur mon carnet ».

Clara Zetkin est la première à donner, dans un rapport qu’elle présente au Comité Exécutif du Komintern en 1923, une analyse lucide de la nature du fascisme et de ses bases de masse, à partir de son instauration en Italie et de ses phénomènes avant-coureurs en Allemagne.

En août 1932, Hitler touche alors au but. Les élections du 31 juillet lui ont donné 38% des voix. A la première séance du nouveau parlement, le 30 août, la masse de ses députés en uniformes brun de S.A., saluent le bras tendu Goering qui va se faire élire président du Reichstag.

Clara Zetkin, 75 ans, presque aveugle, doit, selon l’usage, en tant que doyenne du parlement allemand, prononcer  le discours d’ouverture. Elle monte lentement à la tribune, soutenue par deux personnes. D’une voix d’abord à peine audible, mais qui s’affermit de plus en plus, elle prononce un long appel à combattre l’hitlérisme: « Il s’agit d’abord et avant tout d’abattre le fascisme qui veut réduire à néant par le fer et par le sang les manifestations de classe des travailleurs. L’exigence de l’heure, c’est le front unique de tous les travailleurs pour faire reculer le fascisme. »

clara zetkin âgée

Contrainte de fuir l’Allemagne après l’arrivée des nazis au pouvoir et l’interdiction de son parti, elle arrive à Moscou à bout de force et meurt quelques semaines plus tard le 20 juin 1933, à 75 ans, près de Moscou. La tombe de Clara Zetkin se trouve le long des murs du Kremlin, sur la Place Rouge.