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Freud et le Bardo Thodol

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freudFreud a fait découvrir au XIXème siècle pudibond à l’extrême, les pulsions sexuelles existant chez un enfant.

Or, dans le Bardo Thodol, il est dit que, au moment de la renaissance, si l’entité qui est attiré dans la matrice est un garçon, il souhaite être à la place du père qu’il déteste et éprouve un violent attrait pour la mère.
Symétriquement, si c’est une fille, elle souhaite être à la place de la mère qu’elle déteste et éprouve un violent attrait pour le père.

Et tout le monde occidental de s’exclamer : Ah, tout de même, ces Tibétains, ils sont forts, des centaines d’années avant Freud, ils savaient déjà tout.

Je ne peux m’empêcher de demander qui est l’auteur du Bardo Thödol ? une homme, une femme ?

Qu’est-ce que cette « symétrie » alors que l’évidence de tous les jours nous montre que le comportement sexuel d’un homme n’est pas du tout le même que celui d’une femme ?

bardo-thodol

Revenons à Freud, ses déclarations péremptoires sur la sexualité féminine (qu’il regardera plus modestement vers la fin de sa vie comme « le continent noir ») ont fait longtemps considérer comme de simples fantasmes les agressions sexuelles dont de nombreuses fillettes se disaient victimes, de part d’un père, d’un frère, d’un oncle ou de tout autre personnage masculin de leur entourage. Il a fallu beaucoup de temps, beaucoup de souffrances pour que des incestes soient reconnus et punis par la loi. La domination et la violence vécues dans les familles restaient en dehors de la sphère publique et donc en dehors du pouvoir de la loi. Et aujourdhui, la pédophilie s’affiche au grand jour et recrute sur internet.

Rappelons donc cette évidence : en matière de sexualité, il n’y a pas symétrie entre l’homme et le femme. Une rencontre, pour une femme, c’est avant tout la rencontre d’un autre être auquel elle prend le risque de se donner. Pour un homme, une rencontre, c’est avant tout la recherche de la jouissance par le corps de l’autre.

Lorsque le Bouddha parle du désir et de la souffrance qu’il entraine, cela est particulièrement vrai en matière de sexualité, mais le désir est d’un coté et la souffrance de l’autre.
Abandons, prostitution, pornographie, perversions, sadisme et meurtres mêmes, tout cela des femmes et des enfants le subissent, et ce sont des hommes qui en sont les auteurs.
La somme de cette souffrance est incommensurable. Mais le poids de la domination masculine est tel qu’une femme ose à peine le dire ! Cela dérange les hommes, l’image qu’ils ont d’eux-mêmes. Aussi, par un tour de passe-passe et un beau phénomène de projection, on trouve, sous la plume de Freud mais aussi du Bardo Thodol, qu’en réalité, les hommes et les femmes, dans ce domaine, c’est pareil.

Justement, revenons à l’affirmation du Bardo Thodol quant aux sentiments éprouvés par l’entité à naître. Est-ce qu’il n’y a pas là une négation pure et simple de la différence biologique entre hommes et femmes ?

Il n’est pas possible pour un homme d’avoir une relation sexuelle sans jouissance, tandis qu’il est possible pour une femme de subir une relation sexuelle non désirée et même de concevoir un enfant non désiré. Sans oublier que de nombreuses femmes ne connaissent aucune jouissance sexuelle lors d’un rapport, même accepté et même avec quelqu’un qui leur est cher affectivement parlant.

Au moment même où vous lisez ces lignes, combien de femmes dans le monde subissent des relations sexuelles non désirées ? Toutes celles qui sont mariées sous la contrainte, que ce soit à un vieillard dégoutant ou à un homme violent ou grossier, toutes celles qui ont peur de se retrouver à nouveau enceintes sans le vouloir, qui sont épuisées et ne peuvent se dérober à une étreinte imposée. Et que dire de la prostitution, et des guerres où les femmes sont considérées comme territoire conquis et violées sans le moindre état d’âme par de braves pères de famille ?

Peut-on vraiment penser que si l’enfant d’un viol est une fille, elle a pu « vouloir se trouver à la place de la mère » ? Qui peut écrire ce genre de chose si ce n’est un homme, incapable de se mettre à la place d’une femme ?

Je veux ici, par cette contribution, mettre en garde les femmes quand elles lisent ce genre d’affirmation.

Du point de vue bouddhiste, nous pouvons dire que nous sommes toutes et tous, en raison d’une loi biologique, le résultat d’un désir sexuel masculin. Nous portons en nous ce désir premier dont nous devons nous libérer, mais nous ne sommes pas forcément le résultat d’un désir féminin.
Cette vérité biologique ne se rencontre guère dans les textes bouddhiques !!

Ne jamais rien croire aveuglément; c’est la devise du bouddhisme, appliquons-là à tous les écrits, quels qu’ils soient, même quand ils sont auréolés du prestige de la tradition.
N’oublions pas que pratiquement tous les écrits, toutes les doctrines, tous les enseignements sont le fait d’une plume, d’une réflexion et d’une expérience masculine.
Danièle